Depuis le temps que l'on accuse la Wii de délaisser les vrais joueurs biberonnés aux licences Nintendo, l'arrivée d'un jeu important comme
Super Mario Galaxycristallise forcément toutes les attentes. La série allait-elle se
plier aux exigences d'un nouveau public séduit par la Wii en reniant le
challenge qui faisait son attrait ? Le défi de la gravité allait-il
tenir la distance sans se dégonfler comme un ballon de baudruche ? Des
questions qui trouvent enfin leur réponse aujourd'hui.
Les allergiques à la niaiserie sont invités à zapper au paragraphe suivant. Si si, on insiste. Parce que le scénario de
Mario Galaxypourrait se résumer en deux mots, "princesse capturée", avec plein de
borborygmes tout autour. Comme d'habitude, en fait. Disons que cette
fois, Bowser y a mis les formes, avec un enlèvement spectaculaire
fomenté durant la fête centennale des étoiles. Réunis autour du Palais
Champignon, les Toad qui espéraient profiter de l'occase pour finir
chiffon ont même pu assister en direct au kidnapping. Pire, Bowser a
carrément dérobé l'ensemble du palais avec ses gros lasers perforants,
avant de filer dans les étoiles. Lancé à sa poursuite, Mario fut
contraint de lâcher prise, pour se réveiller sonné sur une étrange
planète. Il fera rapidement la connaissance de la Princesse Harmonie,
qui règne sur les Lumas, des petites étoiles qui l'appellent
affectueusement "Maman". Harmonie, qui dirige l'observatoire de la
comète, confiera à Mario un Luma un peu spécial, avant de lui ouvrir
les portes de la station orbitale. C'est à partir de ce
hub aux
multiples dômes que Mario gagnera accès aux différentes galaxies. Sa
mission : découvrir un maximum d'étoiles en défiant la gravité,
repeupler la station des Lumas, et retrouver ce faisant la trace de
Peach et Bowser. Méfiance, quarante galaxies sont là pour vous faire
perdre la boule.
Space OdysseySe retrouver devant un Mario, c'est au moins la garantie d'une maniabilité exemplaire.
Mario Galaxy,
conçu une nouvelle fois pour exploiter au maximum les possibilités
offertes par la manette, ne faillit pas de ce point de vue. Transition
à la
Wiimoteou pas, niveaux sphériques ou non, on retrouve l'habituelle palette de
mouvements et le même souci de précision qui font la marque de la série
depuis son passage 3D. Les déplacements et le recentrage de caméra se
gèrent avec le stick et le bouton C, les sauts avec A, tandis qu'un
petit tour de poignet permet d'envoyer bouler tout ce qui se trouve à
proximité, principalement. Le pointeur sert quant à lui à récupérer de
multiples éclats d'étoiles disséminés dans le niveau, avant de les
renvoyer aux ennemis - gâchette - pour les immobiliser ou les retourner
comme des crêpes. Les fragments sont aussi le moyen de compenser
l'éventuel inconfort ressenti dès que Mario se retrouve la tête en bas.
Une posture pour le moins inhabituelle, qui mérite bien un petit temps
d'adaptation. L'utilisation de la
Wiimotene se limite heureusement pas à des petits tourniquets, puisque de
nombreux obstacles reposent aussi sur le pointeur ou les mouvements de
la manette. Il faut pointer pour s'accrocher à des étoiles, secouer
pour lancer une carapace, viser pour rebondir d'un cocon élastique à
l'autre. Mais ce sont surtout les épreuves annexes qui exploitent
vraiment la précision et la reconnaissance de mouvements. Les épreuves
de surf de raie façon Wave Race, ou d'équilibre façon Monkey Ball,
demandent d'ailleurs un peu de pratique. Il faut avant tout anticiper
pour ne pas finir au fond du trou. Une fois parti de ce principe, la
précision se révèle assez étonnante. Après de là à dire que
Mario Galaxyaurait été infaisable ailleurs que sur Wii, il y a un pas qu'on ne
franchira pas forcément, mais en termes de sensations, c'est tout de
même un plus.
Et comme Mario
se doit d'être le fer de lance de la machine à chacune de ses
apparitions, on n'est pas surpris de faire face à un jeu peaufiné sur
le plan technique. Qu'on soit clair,
Super Mario Galaxy est
aujourd'hui le plus beau titre de la Wii, et de loin. Aucun
ralentissement, des niveaux variés, des effets savamment dosés (le
corps velu de la reine abeille, les éclairages de la station orbitale,
splendide), des
bossgigantesques, le jeu multiplie les petites touches de bon goût, même si
le design des ennemis comme certains choix de couleur peuvent être
sujets à discussion. Après le banjo craignos de
Sunshineet le thème principal sans plus du volet DS, les musiques sont même
étonnamment bonnes et rythmées ; une bonne surprise de plus. Attention,
on reste dans les limites de la Wii, un
hardware que l'on sait dépassé à l'heure du tout HD
et des consoles bien exploitées. Même en comparant ce qui est
comparable, même en prenant des pincettes, on est donc loin de ce qui
se fait de mieux en termes de technique, dans le genre ou pas. Les
planètes sont petites, le jeu n'affiche jamais des éléments archi
complexes en arrière-plan, les textures sont d'une banalité effarante.
Bref, sur un écran LCD, même en 480p, on déguste. Le jeu est donc une
réussite technique, dans les limites de la Wii. Tout est dit.
Aussi soigné soit-il en termes de prise en main, aussi réussi soit-il sur le plan technique pour la plate-forme,
Mario Galaxy n'échappe pas pour autant aux habituels problèmes de caméra. En l'absence d'un second
stick, et étant donné le concept renversant du jeu, au sens propre, on pouvait d'ailleurs craindre le pire.
Mario Galaxyassure pourtant sa partition sans fausse note la plupart du temps, avec
des réajustements automatiques intelligents pour ne pas entraver la
progression. Du bel ouvrage, très sincèrement. Au pire, la gestion
manuelle de la caméra peut toujours remédier à quelques défaillances,
mais pas toutes hélas. Le repositionnement sur C ou les déplacements à
la croix ne sont pas toujours accessibles, ce qui peut poser quelques
soucis, surtout quand notre ami plombier se retrouve la tête en bas.
C'est aussi le concept du jeu qui veut ça, mais l'inertie aidant, on se
surprend à rater quelques sauts faciles, tout ça pour se faire cueillir
par un goomba tout naze à l'arrivée. Idem, quand Mario prend son envol
autour de la planète, la caméra a du mal à lui offrir un plan de vol
bien dégagé. Bon, au vu de la qualité d'ensemble du jeu de caméra,
c'est surtout du pinaillage. Mais puisque le jeu n'a qu'un véritable
défaut, celui-là, autant le signaler.
Star PowerMalgré l'arrivée d'une telle icône sur Wii, la console-de-la-famille-Benetton, Nintendo n'a pas pour autant sacrifié le challenge sur l'autel du grand public. Bon, il faut forcément nuancer le tableau, Mario ne s'est pas transformé en
Ultimate Ghosts'N Goblins par l'opération du dieu pixel. Mais
Galaxy est en tout cas conçu pour offrir un minimum de répondant sans compter uniquement sur les niveaux purement
old school, plébiscités depuis
Sunshine.
Le cercle de vie se limite cette fois à seulement trois portions (six
avec un champi bonus - rare), le moindre Thwomp vous écrase sans
rémission, et maintenant que la pompe est au placard, il est bien plus
délicat de réajuster le moindre saut un peu hasardeux. Un long plongeon
mal ajusté et ce n'est plus le grand bain qui vous attend, mais un bon
gros trou noir. Il est donc possible de mourir, dans ce Mario, et pas uniquement pour une erreur d'inattention. Le syndrome
New Super Mario Bros. /
Twilight Princessest en partie évité. En partie, puisque le jeu ne sait plus quoi faire
pour vous gaver de "1up", entre les lettres enflammées de Peach, les
champis planqués un peu partout dans la station orbitale, ou les
fragments d'étoiles qui vous récompensent pour 50 puis 100 morceaux. On
ne risque donc jamais vraiment sa peau, dans le fond, et les
checkpointssont toujours placés judicieusement pour éviter les automutilations.
Récupérer les premières étoiles de chaque niveau ne posera donc pas de
problème fondamental, mais il faudra comme toujours affûter un peu son
skill pour les suivantes et faire le tour complet de chaque galaxie.
De ce point de vue, Nintendo a tiré les enseignements de la version GameCube.
Galaxy,
mot magique, est synonyme de diversité, d'évasion, de découverte. De
butinage en fait, comme si le jeu s'était fait le digne représentant de
la génération zapping. Il se permet même le luxe de reléguer les
transformations au second plan, au risque de décevoir ceux qui
espéraient passer leur temps transformé en abeille pour s'envoler, ou
en fantôme pour jouer les passe-murailles. Libres de jouer sur la
gravité, et jamais bridées par un souci de cohérence, d'unité, au sein
d'un même niveau, les équipes de Nintendo
ont pu vraiment donner libre cours à leur imagination, et offrir une
variété hallucinante de situations d'un monde à l'autre, sans jamais
donner l'impression de se répéter. Ce manque de cohérence pourra
d'ailleurs être perçu comme un défaut chez tous ceux qui attendaient
des niveaux d'un seul tenant, façon
Mario 64.
Dans la mesure où chaque galaxie est pensée comme un réseau de
planètes, avec un chemin bien défini, un point de départ et une zone
d'arrivée, l'exploration est un peu mise en sourdine, pas la peine de
le nier. Voilà pourquoi certains joueurs auront l'impression d'être
sans arrêt baladés d'un endroit à l'autre, toujours en transit, sans
avoir vraiment eu l'occasion de chercher un chemin alternatif pour
décrocher l'étoile.
Le MagicienMario Galaxy joue plutôt sur l'émerveillement perpétuel, lié au
plaisir simple de déflorer chaque nouvelle zone, de vivre chaque
atterrissage comme la promesse d'une nouvelle expérience. On s'emballe
forcément un peu, puisque les obstacles ou les ennemis sont forcément
recyclés à un moment ou l'autre. On n'échappe pas non plus aux codes
habituels de la série et même du genre, avec le bestiaire typique, les
inévitables volcans, la
Ghost House, les plantes carnivores et ainsi de suite. Les vaisseaux fantômes de
Mario 3 sont même de retour, avec la petite musique remixée, preuve qu'il n'y a pas de limites au
fanservice. Mais en terme de variété, de construction, de rythme, même de
boss,
le jeu s'impose directement comme le nouveau mètre-étalon de la
plate-forme, avec une diversité qui force le respect. Il serait malvenu
de
spoiler,
mais du début à la fin, on ne peut qu'être admiratif devant tant
d'imagination déployée, tant de bonnes idées bien exploitées. La
cadence ne faiblit pour ainsi dire jamais. Et puis quitte à revenir une
nouvelle fois sur la linéarité des niveaux, Nintendo a bien pensé à quelques subterfuges pour remédier au problème.
Le joueur est déjà libre de papillonner d'une galaxie à l'autre sous
réserve qu'il dispose du nombre de super étoiles requis. D'un simple
point de vue comptable, le nombre de galaxies dépasse à l'aise la
trentaine, là où
Mario Sunshinecomptait sur sept vrais niveaux, une poignée de mondes "classiques" et
un maximum de pièces bleues pour atteindre le quota. Dans ces
conditions, il est déjà plus facile de tromper le sentiment de déjà-vu.
Certains Lumas offrent aussi des anneaux-étoiles différents une fois
repus de fragments, certaines étoiles cachées méritent un second voyage
pour être débusquées, et on ne parle pas des challenges alternatifs.
Des photos de lieux bien précis vous seront par exemple transmises pour
taquiner votre mémoire visuelle avant de retrouver le bon endroit - pas
très dur vu les indices laissés, cela dit. De temps à autre, ce sont
des comètes de couleur qui viendront corser l'affaire en imposant des
contraintes : limites de temps, Mario bleu, vitesse doublée des ennemis
ou un
bossavec un unique point de vie, les situations ne manquent pas. Bref, le
temps des niveaux modèles réduits et des pièces bleues de
Mario Sunshine paraît loin, vraiment.
Comme nous l'avions appris à l'E3,
Super Mario Galaxy inclut un semblant de jeu en coopération, puisqu'un second joueur peut saisir à tout moment une deuxième
Wiimotepour prêter main-forte à Mario. C'est un peu gadget, ça ne change pas
grand-chose, puisque l'interaction se limite à un pointeur jaune. Un
ennemi ou un rocher paralysé, un
bossqui ne bouge plus, un tremplin salvateur, c'est toujours ça de pris.
Une option mignonne, donc, surtout pour ceux qui ont l'habitude de se
retrouver à plusieurs devant leur Wii.
Mais encore ?Estimer la durée de vie d'un Mario
paraît difficile, dans la mesure où le temps de jeu peut varier du
simple au double en fonction du style de jeu. Entre ceux qui ne visent
que l'étoile, celui qui cherche à récupérer tous les fragments, ceux
qui procèdent planète par planète de façon méthodique, plusieurs écoles
s'affrontent.
New Super Mario Bros.avait d'ailleurs surpris avec ses deux, trois heures de jeu en ligne
droite. Pour la jouer réglo, disons qu'il nous a fallu une petite
dizaine d'heures pour atteindre le quota des soixante étoiles requis et
ouvrir l'accès au "dernier" niveau. En appliquant la méthode trois
sus-citée. Un temps qui aurait pu donc être légèrement inférieur sans
chercher absolument à plier les niveaux challenges super chaudards. On
a déjà vu plus long dans le même genre, c'est sûr. Pour boucler le jeu
à 100% et découvrir tous ses secrets, il faudra en revanche facilement
engloutir une vingtaine d'heures, voire plus sans soluce. Et vu le
plaisir inouï que l'on prend à parcourir les galaxies en compagnie de
Mario, cela n'a rien d'un sacerdoce.
9 Excellent
Super Mario Galaxyplace définitivement la Wii sur orbite. D'une folle ingéniosité, le
concept de micro-planètes et de gravité offre tellement de liberté par
essence que Nintendo
a pu laisser vagabonder son imagination sans jamais s'enferrer ou
brider sa créativité. Le résultat donne un jeu d'une inventivité
débordante, incroyablement rythmé, que l'on dévore gloutonnement avec
un plaisir sans cesse renouvelé. Impeccable sur le plan technique, dans
les limites de la Wii s'entend, presque irréprochable sur le plan de la
jouabilité, à quelques errements de caméra près,
Super Mario Galaxytient donc toutes ses promesses, y compris en termes de challenge, ce
que l'on n'espérait plus. La plate-forme 3D à son apogée ? Bien sûr que
oui.
Les plus...
- Un plaisir de jeu inégalé dans le genre
- Niveaux nombreux et variés
- Plein de boss rigolos
- Challenge bien dosé
- Musiques soignées
- Durée de vie à la hauteur
Les moins...
- Quelques soucis de caméra
- Un peu plus linéaire que d'habitude
- Passages sous-marins pas terribles
- Option deux joueurs mignonne, sans plus
source: Gamekult