pose son flood, tel le véritable boulet.

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Depuis sa récompense lors du festival de Cannes de 2004, alors sous la présidence d'un Quentin Tarantino conquis, le chef-d'oeuvre sud-corréen "Old boy" se pose comme l'illustration la plus exemplaire du savoir-faire cinématographique asiatique. D'une richesse et d'une complexité infinies, la puissance qui émane d'Old boy passe par ses acteurs, ses décors, ses effets stylistiques, mais également et surtout par sa musique. OST expérimentale, celle-ci est à l'image du film et puise sa richesse dans son extraordinaire complémentarité avec le scénario. Car en effet, il suffit de voir le film, puis ensuite de se consacrer à son OST pour se rendre compte d'une chose rarement vue à ce jour. Cette musique, si singulière, épouse trait pour trait la psychologie du personnage principal tout au long de l'histoire.

La première piste donne ainsi clairement le ton. Introduisant le film, le thème intitulé "Look who's talking", parvient grace à ses différents instruments à résumer en quelques notes de musique la trame du film, ou du moins la variation des sentiments que subiront les protagonistes. Alors que le début du thème semble plutôt sobre avec un fort ressentiment de mélancolie, le tout s'accentue à mesure que s'égrainent les notes. Les dernières secondes laissent finalement place à un total changement de rythme, beaucoup plus sec et sauvage, ce genre de rythme qui nous fait prendre conscience que nous sommes vivant. A ce sens, le thème 3 "The count of Monte-Cristo" exprime les mêmes sentiments. Ici, les instruments à corde se chargent de nous faire voyager dans l'ésprit du personnage. Alors que violons sont synonymes de mort, le thème véhicule une tristesse inouie et nous fait entrevoir les sombres pensées du héros, alors enfermé dans sa cellule depuis 3 ans.

Avec la piste 5 "In a lonely place", les sentiments changent quelque peu. Alors que Oh Dae-Su vient de quitter sa cellule, l'espoir renait et se fait une place dans le coeur du héros; entre le désespoir et la haine apparait soudain l'espoir. Thème composé de percussions entêtantes, "In a lonely place" donne la sensation que le héros revit. Mort dans sa cellule de misère durant 15 ans, sa désincarcération le voit revenir dans le monde des vivants. Cette envie de revivre s'éxprimera par les quelques notes de trompette se mêlant aux percussions qui continuent leur leight-motiv morbide. C'est le contraste entre trompette et percussions qui apporte toute la richesse au thème, et qui ainsi nous fait voir le héros comme une personne qui n'est pas vraiment vivante, mais qui n'est pas morte pour autant (d'ailleurs au moment ou "in a lonely place" est joué dans le film, Oh Dae-Su apparait tout en noir, avec des lunettes noires; de là à y voir un messager de la mort tentant de racheter sa vie, il n'y a qu'un pas...). Mais si ce thème est indispensable, les pistes 6 et 8 seront en revanche d'intérêt assez moyennes; les sonorités sont reprises d'autres pistes et on a l'impression que les compositeurs on recyclé les autres partitions. Cependant ceci n'est au final pas bien grave puisque ces deux pistes se révèlent être assez courtes.

Mais alors que le 5ème thème apportait un semblant d'espoir, le 9ème, "Winter" des Quatres saisons de Vivaldi vient taire tout aspect joyeux pour au contraire éveiller la bête qui sommeille en chacun de nous et dans le héros. Accompagnant la mythique scène de torture du film, la musique classique est clairement le genre qui cotoie le mieux la barbarie et la violence sans nom qui sont illustrés lors de la scène (j'en veut pour preuve un autre réalisateur qu'est Stanley Kubrick, qui pris des thèmes composés par Beethoven pour accompagner son corrosif Orange mécanique). "Winter", donc, traduit très bien l'explosion soudaine des émotions du personnage principal, qui n'est alors plus un homme mais s'est changé en bête féroce. Les violons et autres instruments à corde se partagent les partitions dans un rythme éfréné, et c'est à un feu d'artifice de sonorités que nous avons droit. Mais il fallait au moins cela pour accompagner le marteau brandit par le héros, qui part ce thème musical montre à quel point son désir de vengeance est grand. "Room at the top", le 10ème thème retombe brièvement dans les défauts des 6ème et 8ème en n'apportant rien a l'OST.

Il faudra attendre la 13ème piste "From whom the bell tolls", pour revoir une once d'espoir avec un thème faisant pour le moins penser aux valses qui se laissaient entendre dans les cours des palais aux temps des grands Rois. Sur un rythme lent servi parfois par de brêves accélérations, le thème réspire l'envie de vivre. Ce sont toujours des violons qui occupent le devant de la scène, avec une apparition d'instruments à vent, qui n'étaient jusque-là pas vraiment présents.
Les 4 pistes suivantes seront en revanche d'une richesse amoindries. En effet, quand les thèmes précédemment cités apportaient une dimension nouvelle par rapport aux images et à l'émotion qu'elles procurent, ces quatre-ci ne font que servir d'accompagnement musical ordinaire, sans autre subtilité que la nécessité de coller une musique a un passage précis du film.
Mais alors qu'Oh Dae-Su se croit prêt du but et proche de l'aboutissement de sa quête, les interrogations surgissent, à l'image de celles du film: "pourquoi m'a-t-on enfermer? Qui?.... Le thème 18 "Frantic" illustre de manière indiscutable ce ressentiment qui envahit alors le héros. Thème entêtant, semblant infini, celui-ci se compose de notes qui se répètent inlassablement, tout comme les questions et les doutes qui cognent dans la tête du héros. Nous sommes alors plus que jamais dans le "moi" profond de celui-ci.

Mais après les doutes arrive le dénouement, et aussi la perte de tout espoir. Alors que la quête d'Oh Dae-Su se termine dans un tourbillon d'émotions, le héros se retrouve divisé en deux hommes bien différents: l'être humain souhaitant vivre et la bête sauvage condamnée a vivre pour la mort. Le thème 23 "The big sleep" semble être une parrallèle à ce constat. En effet, au début de ce même thème, la mort entame sa triste marche funèbre, symbolisée par le son des tambours, la dernière heure est-elle proche? Mais l'homme se bat, et voila que l'on peut entendre le son de la trompette annonciatrice d'espoir. Alors que celle-ci représente l'homme voulant vivre, elle va amorcer sa langoureuse plainte entre les tambours qui se taisent peu à peu.
L'homme souhaitant vivre parvient à vaincre la bête, la trompette vient à bout des tambours, et le dernier acte peut commencer. Dernier thème du film, "The last Walz" est sans doute le plus gai, même si vous comprendrez qu'on ne rira pas aux larmes en l'écoutant. Car cette gaieté reste sobre; les instruments à vents se mêlent aux instruments a corde, donnant au tout un lyrisme étonnant. Et on ne pourra s'empêcher de trouver ce thème quelque peu mélancolique, surtout au vu de la fin du film. Symbole d'un nouveau commencement, cette 24ème et dernière piste cloture l'OST de Old boy de manière brillante et émouvante.

Pour conclure, suffit-il de dire que cette OST est si pleine d'émotion qu'elle en devient presque humaine? Suffit-il de dire qu'une seule des notes jouées procurent plus d'émotion que bien des mots? Enfin, suffit-il de s'émouvoir en l'écoutant pour proclamer que celle-ci est excellente? Ce qui est sûr au moins, c'est qu'un homme ou une femme normale ne pourra rester de marbre devant tant d'authenticité, car il ou elle se reconnaitra a un moment donné dedans. Car ce qui fait le pouvoir de l'OST d'Old Boy, c'est son pouvoir de nous montrer que nous sommes humains avant tout, le pouvoir de nous faire frissonner...